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A Avignon, dans « Qui som ? », Baro d’evel remoule les pots cassés d’une humanité en miettes

Grand moment de jubilation sauvage et cathartique à Avignon, mercredi 3 juillet, où les festivaliers ont découvert la compagnie franco-catalane Baro d’evel avec sa nouvelle création, Qui som ? (Qui sommes-nous ?), laquelle a fait vibrer tous les espaces du lycée Saint-Joseph d’une énergie vitale irrésistible face aux apocalypses en cours.
Qui sommes-nous, dans les temps mauvais que nous vivons ? Entre argile originelle et orgie de déchets plastiques, entre musique baroque et techno robotique, entre homme et animal, de quoi sommes-nous faits, pétris, contaminés, souillés ? La cérémonie, avec Baro d’evel, commence avant même le spectacle lui-même. En arrivant dans le lycée, les spectateurs sont conviés, par des officiants tout vêtus de noir, à rejoindre les gradins installés dans la cour, en traversant une exposition de pots en céramique blanche. De beaux objets qui se dressent, droits, simples et purs.
Sur la scène, à cour et à jardin, s’alignent de même deux rangées de poteries. La céramique est le motif filé de tout le spectacle, comme figure d’une humanité qui peut toujours se reformer, se refonder, se repétrir à partir du limon originel. La preuve avec une première scène qui met les spectateurs dans sa poche avec un numéro de clown aérien et décalé, qui donne le ton d’emblée : l’un des pots s’étant malencontreusement cassé, il va s’agir d’en remouler un en direct. Or, l’objet prend rapidement la forme d’un pénis entre les mains du céramiste un peu paniqué, avant de se briser à son tour dans l’hilarité générale.
Le clown, l’acrobatie, les arts plastiques, la danse, le théâtre, la musique se mêlent en toute liberté dans ce spectacle où se lit la grande histoire du burlesque et, donc, de la fragilité humaine. Il va être question ici de glisser, de tomber, de se relever et de tomber encore. De rester vivant et élégant quoi qu’il arrive, même si chaque chute vous laisse un peu plus maculé, taché, crotté. D’accueillir des mues multiples, quand dans la vie c’est no way pour garder la pureté du blanc et du noir, qui irrémédiablement se mélangent.
Il va être question, surtout, de transformations à l’infini, qui affectent aussi bien les corps que l’espace, au centre duquel trône un étrange monticule en mode yéti endormi. Bientôt, les performeurs se métamorphosent en étranges créatures à la fois archaïques et futuristes, se recouvrant la tête de ces pots en terre encore malléables, y faisant deux trous pour les yeux et un pour la bouche, convoquant nombre de rituels où le masque sert à l’humanité à se refigurer.
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